Gordon Craig et le masque de la méthode : Robinson Crusoé et son bûcher de mille navires

Résumé

Edward Gordon Craig était fasciné par les masques. Il collectionne, catalogue mais aussi étudie leurs possibilités expressives et pédagogiques. Chez Craig, le masque dépasse sa signification concrète pour devenir un mécanisme d’investigation et d’approfondissement de sa recherche. La création de personnages, cachés sous des pseudonymes, faisait partie de cet artifice de création d'une polyphonie de voix créée par lui-même, pour que chaque raisonnement puisse être poussé jusqu'au bout. Sur cette contradiction, Craig a bâti sa pensée hétérodoxe et révolutionnaire.
Les personnages solitaires et contradictoires, comme Hamlet, le satisfaisaient avant tout. Mais sa rencontre avec Robinson Crusoé, de Daniel Defoe, était symbolique non seulement parce qu'elle reflétait sa croyance dans la mythologie de l'homme qui construit une civilisation de ses propres mains, mais aussi dans celle du naufragé, abandonné dans un monde désolé et sombre. environnement, comme celui de la seconde grande guerre déjà annoncée.
Cette étude porte sur ce que j'ai appelé une méthodologie de masquage, et en raison du caractère solitaire et civilisateur qu'implique cette méthodologie, j'utilise comme base de réflexion le projet de Craig d'illustrer par des gravures une publication du roman Robinson Crusoé, de Daniel Defoe. Craig s'identifiait à la solitude de Crusoé et d'Hamlet et à leur capacité, même s'ils étaient seuls, à être nombreux.